Une inscription à la base du monument rappelle que celui-ci a été élevé en 1905 à l'initiative de la 763^e section des vétérans en hommage aux morts de la guerre de 1870-1871 et des conflits antérieures. Détruit au cours de la Grande Guerre, il a été reconstruit en 1926.

Aux enfants de Douvrin
Victimes de la guerre
1870-1871   1914-1918
1939-1945

Fondé par la 763^e section
de vétérans en 1905
et réérigé en 1926

La commune de Douvrin, comme tant d’autres situées sur la ligne de feu pendant la guerre, fut totalement détruite. Grâce au courage de ses habitants, cette riante localité de 3000 âmes est aujourd’hui presque totalement reconstruite. En procédant à la reconstitution de leurs biens matériels, les Douvrinois n’oublièrent pas les leurs qui, en grand nombre, sont tombés sur les champs de bataille pour la défense du pays. Ils décidèrent d’ériger à leur mémoire un monument qui vient d’être terminé et s’élève au coin de la Grande Place, près de l’église, presque reconstruite. La municipalité, présidée par M. Fiévet, maire, avait organisé une grande cérémonie qui s’est déroulée hier pour l’inauguration du monument du souvenir. Cette cérémonie fut grandiose. Pour rendre hommage aux grands morts, les habitants avaient pavoisé leur habitation et dans toutes les rues du bourg se dressaient de nombreuses fausses portes et portant des inscriptions en hommage aux héros et des souhaits de bienvenue pour les nombreuses sociétés qui, par leur présence, donnèrent un éclat majestueux à la cérémonie.

La municipalité organisatrice avait pour la circonstance invitée plusieurs parlementaires, notamment MM. Maes, sous la présidence duquel était placée la cérémonie ; Evrard, député du Pas-de-Calais et Renaudel, député du Var. Ainsi que les maires des communes voisines. Vers 11 heures, la musique municipale et la société de trompettes se rendirent route d’Haisnes à la rencontre de ces invités ; un cortège se forma aux sons d’un pas redoublé, traversa les principales rues de la commune pour se rendre à l’école des filles qui sert provisoirement de mairie. Là, M. Fiévet, maire, entouré de MM. Courcel et Dambrine, adjoints et de tous les membres du conseil municipal, souhaita aux invités la bienvenue au nom du conseil et de toute la population. Se faisant l’interprète de ses collègues parlementaires, M. Evrard remercia le maire de l’accueil chaleureux qui venait de leur être témoigné et une coupe de champagne fut ensuite servie.

Le banquet
Précédés des mêmes sociétés musicales, les invités, les membres du conseil municipal et une foule de militants et de représentants des organisations ouvrières se rendirent au Marais, salle Guilluy, superbement décorée où a eu lieu le banquet par souscription. A la table d’honneur, M. Fiévet, maire, avait à ses côtés MM. Maes, Evrard, Renaudel, députés ; Larue, conseiller général ; Bauont, conseiller d’arrondissement. Parmi les convives, au nombre de 80, on remarquait MM. Sion, trésorier du syndicat des mineurs du Pas-de-Calais ; Holle, maire d’Auchy ; Erouard, maire de Vendin-le-Vieil ; Renau, maire de Berclau ; Lancry, maire de Wingles ; Trédez, maire de Meurchin ; De Goet, maréchal des logis de gendarmerie de la brigade de Carvin, etc. Le repas, excellemment préparé et servi, fut empreint de la plus franche cordialité. Au dessert, M. Fiévet, maire, prononça une vibrante allocution dans laquelle il souhaita la bienvenue aux convives, remercia les élus de leur présence et les exhorta à continuer de servir la cause de la justice et de défendre les intérêts de la classe ouvrière. Maes, Evrard et Renaudel, lui répondirent en quelques mots et le remercièrent de ses bonnes paroles comme de l’accueil chaleureux qui leur fut réservé.

L’inauguration du monument

Mes chers concitoyens, nous sommes rassemblés aujourd’hui dimanche 29 mai pour inaugurer le monument des enfants de la commune de Douvrin, qui comme beaucoup de leurs frères des villes et villages de France, sont tombés sur les champs de bataille au cours de l’affreuse guerre. Notre paisible localité, qui pendant presque toute la durée des hostilités, s’est trouvée sur la ligne de feu et à proximité immédiate de la fameuse redoute Hohenzollern, fut totalement détruite. Douvrin a donc subi un double fléau : celui de la destruction de ses habitations et tout le cortège des sacrifices et des misères humaines. A la fin du terrible cataclysme et malgré l’immensité des ruines accumulées, les laborieux habitants de la commune s’attachèrent par d’opiniâtres efforts à faire renaître, tant au point de vue minier qu’au point de vue agricole, toute l’activité qui régnait ici avant guerre. Aujourd’hui, les traces de destruction de la grande tourmente sont presque totalement disparues. Mais au dessus des ruines matérielles qui sont toujours réparables, nous avons celles qui ne le sont pas. Cent quatre des nôtres, qui appartiennent à toutes les classes et conceptions sociales, sont tombés sur tous les points du front. A cette liste déjà si longue, nous ajouterons les noms des victimes civiles, qui moururent soit tués par la mitrailles ou décédés des suites de souffrances physiques et morales et de misère pendant les tragiques et nombreuses péripéties de l’évacuation. En érigeant ce monument à ses enfants, la commune de Douvrin a voulu les unir et perpétuer le souvenir de leur sacrifice. Aussitôt notre souscription publique ouverte, nous eûmes la satisfaction de constater que chacun, suivant ses moyens, apporta les subsides nous permettant de construire ce modeste monument qui rappellera aux générations futures la mémoire de ceux qui se sacrifièrent pour la défense du pays. En citant les noms de nos concitoyens qui sont restés dans la fournaise de 1914-1918, nous croyons être autorisés à dire ici que leur pensée était qu’en faisant la plus épouvantable des guerres, celle-ci devait être la dernière. Pour rester fidèle à l’idéal et aux conceptions de nos morts, nous devons aujourd’hui plus que jamais, faire ressortir les menées criminelles de ceux qui voudraient, par intérêt particulier, pousser les peuples à de nouveaux conflits sanglants et nous atteler résolument à la grande cause de la paix universelle. En mon nom personnel, au nom de la municipalité, et en celui de toutes la population de Douvrin, je m’incline devant toutes les malheureuses victimes des guerres de 1870-1871 et de 1914-1918, dont les noms sont gravés sur la pierre. Hommage à nos grands morts ! Hommage à Douvrin ! Hommage à la paix !

Puis, tour à tour, Maes, Evrard et Renaudel, députés, prononcèrent des allocutions d’une très grande inspiration et de haute portée, tirant notamment des conséquences de la guerre, les enseignements qui doivent le mieux servir la cause de la paix, et rendirent un hommage ému aux héros qui sont tombés sur les champs de bataille pour la cause du droit et avec le sentiment de tuer à jamais la guerre. Ces discours firent une impression profonde sur la foule. Le reste de la journée fut occupé par des concerts et des mouvements d’ensemble données par les sociétés musicales et les sociétés de gymnastique, dans les différents quartiers de la commune. Douvrin a rendu dignement un éclatant hommage à ses grands morts.