Le Pas-de-Calais Hebdomadaire
relate l’inauguration du monument dans son édition
du 13 juillet 1924 :
La commune de Sailly-sur-la-Lys, dans une grandiose manifestation patriotique,
a dignement honoré, le dimanche 6 juillet [1924], la mémoire
de 80 de ses enfants, morts au champ d’honneur et des victimes civiles
décédées au cours de l’occupation. Le programme de
la fête comprenait la remise des drapeaux aux sociétés
locales, la messe en commémoration des morts de la guerre et l’inauguration
du monument aux enfants de Sailly, morts pour la patrie, inauguration qui
avait lieu sous la présidence de M. Stirn, sous-préfet de
Béthune, sous la présidence d’honneur de M. le général
Gascouin, commandant l’artillerie du 1er corps, accompagné des personnalités
politiques de la région, M. Couhé, député,
conseiller général du canton de Laventie, M. Duquesne, maire
de Laventie, conseiller d’arrondissement.
Sailly-sur-la-Lys, en partie relevé
de ses ruines, avait revêtu sa parure de fête. Toutes les maisons,
décorées avec autant de goût que d’émulation,
offraient un cadre magnifique à cette manifestation unanime de sympathie
aux familles éprouvées par la guerre et de reconnaissance
aux héros tombés au champ d’honneur. Dans toutes les rues,
s’élevaient des fausses portes de feuillages et de fleurs et deux
magnifiques arcs de triomphe, parfaits de goût et d’originalité,
dus à la générosité des entrepreneurs locaux
MM. Debruille et Ménard, s’ouvraient dans la rue principale, aboutissant
au monument.
* *
La remise des drapeaux
En présence du conseil municipal, réuni à la mairie,
M. Couhé, député, conseiller général,
procéda à la remise des drapeaux à la société
des anciens combattants et mutilés et à la compagnie reconstituée
des sapeurs-pompiers, et prononça une allocution patriotique.
* *
La messe
A dix heures, la messe solennelle fut chantée par M. l’abbé
Ployart, originaire de Sailly-sur-la-Lys, ex-capitaine de la guerre, chevalier
de la Légion d’honneur, croix de guerre. M. le maire de Sailly,
entouré de son conseil municipal, M. Couhé, député,
les délégations de toutes les sociétés, assistaient
à la cérémonie. M. le chanoine Régent, aumônier
militaire, officier de la Légion d’honneur, dans un sermon qui fit
une profonde impression traita magistralement de l’immortalité de
l’âme. Puis, eut lieu la recommandation des morts. La musique communale,
dirigée par son excellent chef, M. Broucke, se fit entendre au cours
de la cérémonie. A l’issue de la messe, M. le curé
de Sailly procéda à la bénédiction solennelle
du monument, érigé à l’entrée de l’église
et M. le chanoine Régent prononça une vibrante allocution.
Les cérémonies religieuses étaient terminées.
* *
Le banquet
A une heure, dans la salle de l’auberge
A la Croix de Sailly, un banquet réunissait plus de deux cent convives.
A la table d’honneur, avaient pris place, auprès de M. Boutte, maire
de Sailly, M. Couhé, député, conseiller général
; M. Duquesne, maire de Laventie, conseiller d’arrondissement ; M. le chanoine
Régent ; M. Couhé-Lebleu, président honoraire du tribunal
de Lille ; M. Charles Lebleu, conseiller à la Cour de Douai ; MM.
les maires et adjoints des communes voisines, de Lestrem, Fleurbaix, Lorgies,
Laventie, Neuve-Chapelle, le conseil municipal de Sailly-sur-la-Lys, les
présidents des sociétés participantes ; MM. les architectes
et entrepreneurs locaux ; MM. les juges de paix du canton de Laventie.
A la fin du repas, pendant lequel ne cessa de régner la plus franche
cordialité, M. Stirn, sous-préfet de Béthune, et M.
le général Gascouin, retenus jusque là par d’autres
cérémonies, furent accueillis avec les marques de la plu respectueuse
sympathie. M. le maire de Sailly, ouvrant la série des toasts, remercia
en termes délicats et heureux, les personnalités présentes
à la fête et souleva les applaudissements unanimes de l’assistance
en saluant M. Couhé, député du Pas-de-Calais, enfant
de Sailly-sur-la-Lys, dont la jeune gloire rejaillit sur la commune toute
entière. M Couhé, dans une brillante et spirituelle improvisation,
répond à M. le maire, remercie les organisateurs de la fête
et du banquet si particulièrement réussi et, brossant un tableau
magistral de la situation actuelle, en tire les conclusions nécessaires
pour que le sacrifice de nos héros ne soit pas inutile. M. Stirn,
sous-préfet de Béthune, qui se défend de vouloir faire
un discours, mais, qui sait en quelques mots, dire beaucoup de choses aimables
pour tous, termine en portant la santé de M. Doumergue, président
de la République.
* *
L’inauguration
Après avoir passé en revue les sociétés prenant
part à la fête, sociétés locales de musiques,
de sapeurs-pompiers, d’anciens combattants, sociétés voisines
de Fleurbaix, de Laventie, d’Estaires, Le Doulieu, Neuve-Chapelle, Stenwerck,
le cortège officiel se rend au monument et prend place sur une estrade.
Le monument, dû à l’inspiration
de M. Monoyer, architecte de la reconstitution de Sailly, est tout à
fait remarquable. Il se compose d’une stèle, portant une épée
tournée vers la terre et u hémicycle sur lequel sont gravés
les noms des victimes de la guerre avec en exergue les vers classiques
:
Ceux qui pieusement sont morts, etc. M. Ménard, président
du comité d’érection, remet le monument à l’administration
municipale. M. Boutte, maire, remercie le comité et prononce un
discours patriotique très applaudi. M. Delettrez, ancien combattant,
fait l’appel des morts. M. Couhé, député, en termes
d’une haute élévation, salué la mémoire des
héros tombés au champ d’honneur, tire les grandes leçons
qui se dégagent de leur sacrifice, librement consenti et associe à
leur gloire, la mémoire de M. Henri Lebleu, maire de Sailly pendant
l’occupation, et de M. l’abbé Allart, curé de Sailly en 1914,
dont la conduite héroïque fut un réconfort puissant pour
la population.
M. le général Gascouin rappelant l’agression de l’Allemagne,
et la durée de la guerre, due à notre manque de préparation,
rend hommage aux morts, hommage qu’il veut plus viril que les larmes, et
exhorte l’assistance à comprendre la nécessité d’une
préparation sérieuse pour éviter le retour des horreurs
de la guerre moderne.
M. Stirn, sous-préfet de Béthune, s’associe aux précédents
orateurs, pour rendre hommage aux morts, il rappelle le travail accompli
depuis l’armistice, et dans une éloquente évocation du soldat
républicain, glorifie ceux qui sont tombés pour que vive la
France et la République.
La musique municipale et un groupe de jeunes gens de la commune exécutent
l’hymne aux morts de Victor Hugo, qu’écoute religieusement l’assistance,
puis a lieu la dislocation. Cette belle et inoubliable manifestation se
termine par l’exécution très applaudie de concerts, donnés
par les musiques participantes, sur différents kiosques érigés
sur plusieurs points de la localité.
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