Voici comment le journal Le
Courrier du Pas-de-Calais rapport l'inauguration et la bénédiction
du monument au caporal Plaisant dans son édition du mardi 13 septembre
1921
Warluzel
C’est un chaleureux merci que nous
nous plaisons à rendre publiquement à M. le curé
de Noeux-les-Mines d’abord, qui, bien que surchargé de travail
dans une importante agglomération minière, a bien voulu venir
présider la cérémonie patriotique patriotique et
religieuse que nous avons faite à l’occasion de l’inauguration et
de la bénédiction du monument élevé par ses
parents au caporal Oscar Plaisant. Merci à M. le maire qui a si
bien représenté la commune en partageant avec M. l’abbé
Lefebvre, la présidence de la cérémonie.
Merci à MM. Les membres de la chorale des mines de Noeux,
que leur président accompagnait ; au musicien du Réveil
de Clichy et aux délégués des sociétés
de la Croxi Rouge : les Secouristes et Sauveteurs ambulanciers de la région
Ouest. Merci enfin à toute la paroisse et à l’assistance qui
a pris part avec une sympathie touchante à l’hommage que nous avons
voulu rendre à un enfant du pays, comme aussi à tous nos
autres morts pour la France.
Favorisé par un temps superbe, nous avons vécu une
journée du souvenir vraiment belle.
Dès 10 heures, notre trop petite église commença
à se remplir et bientôt, elle fut comble comme jamais. A
peine nos sociétés peuvent avancer pour prendre leurs places
respectives dans le chœur et en tête de l’église.
Le grand’messe commence aussitôt.
Dans un profond recueillement, en même temps qu’au pied de
l’autel monte vers Dieu la prière du prêtre, les graves et
mâles accents de nos artistes de la chorale s’élève
avec force, empoignant les âmes de tous les assistants.
La messe de Chanat est brillamment exécutée.
Ce que nous avons surtout senti, et qui impressionna le plus, ce
fut les Amen et les Répons donnés par toutes ces voix puissantes,
avec l’ensemble le plus parfait.
Puissent le fidèles qui savent aussi sentir, se donner eux-mêmes
cette impression en communiant moins passivement aux prières de
l’office divin par leur participation au chant de ces Répons et
Amen.
Après le prône, M. le curé de Noeux, dans un
sermon très goûté, rappela ce qu’ont fait nos soldats
et à quels prix ils ont sauvé nos biens et notre liberté,
notre génie et notre foi. En conséquence, il incita les
familles, les villages, les pays, à ne jamais oublier : à
profiter de toutes les occasions pour célébrer, de glorifier
les chers morts et de prier pour eux ; à pratiquer de mieux en mieux
et de plus en plus l’union sacrée.
Aussitôt la messe terminée, un marbre commémoratif,
apposé dans l’église, fut béni et la musique le
réveil de Clichy termina l’office par une sortie d’un brio très
remarqué.
L’après-midi s’annonce aussi beau que la matinée.
Les rues se remplissent de monde ; on vient de tous les pays environnants.
Cependant que le chant solennel des vêpres s’achève, le cortège
se met en branle vers le lieu du monument. La musique du Réveil
marque militairement le pas. Une foule compacte se presse autour du superbe
monument, qui supporte le buste en bronze du caporal Oscar Plaisant.
La sonnerie au drapeau retentit, puis un silence profond laisse
entendre la voix de M. l’abbé Lefebvre, qui bénit l’objet
du souvenir. Et tandis que l’eau bénite tombe et sanctifie le
marbre auréolé de la Croix et que tout le monde se signe,
la sonnerie Aux Champs éclate.
Nous sommes heureux d’entendre alors la forte voix du chef de section
qui commanda le caporal Plaisant. Il fit un cordial éloge de son
ancien camarade et sous-ordre, exalta son courage, sa bravoure et son
dévouement final, lorsqu’il s’offrit pour la mission périlleuse
dans laquelle il succomba. Puis, il remit à M. le maire la Croix
de guerre et la médaille militaire que ses citations posthumes
ont valu au jeune héros.
M. le maire présenta aux parents ces décorations,
puis les déposa au monument et, prenant la parole, il dit en termes
émus son hommage au vaillant soldat.
M. Louis Petit, président
du Réveil, et M. Stékler, au nom de la société
des Sauveteurs ambulanciers, saluèrent leur ancien camarade et
déposèrent chacun au pied du monument, une jolie palme aux
feuilles d’argent offerte par les membres de leur sociétés.
M. Petit, président de la société les Secouristes,
évoqua ensuite les jours passés où, sous nos yeux,
le jeune Plaisant se formait au rôle de secouriste, admira son sacrifice
et s’inclinant devant son buste, il termina ses chaudes paroles par ce
cri du cœur : « Vive la France ! ».
C’est alors que M. le curé de Warluzel fit entendre un éloquent
discours que tout le monde admira. « la France, dit-il, avait exalté
ses héros vivants et les avait immortalisé en les faisant
passer sous l’arc de triomphe. Elle voulut rendre à ses nombreux
martyrs, hélas ! combien nombreux ! la gloire qu’ils méritaient,
et elle conçut pour cela cette sublime idée de les unir tous
dans l’hommage qu’elle rendit à la dépouille d’un soldat inconnu
qu’elle recueillit de la terre des grands combats. Oh oui ! grands morts
de la grande guerre, soyez glorifiés, soyez magnifiés, et
jamais nous le ferons d’une manière digne de votre sacrifice ! Soyez-le,
soyez-le par nous, nous, vos frères, nous vos pères, vos épouse,
vos enfants, soyez-le à jamais ! Soyez-le noble enfant de Warluzel,
et respectueusement je me découvre devant votre figure, qui rayonne
sa part de la victoire de nos armes et de notre liberté ».
La chorale des mines de Noeux entonna le bel hymne de Victor Hugo
« Gloire à notre France éternelle
» ; puis, nouvelle aubade de la musique et, au retour, station au
monument communal des enfants de Warluzel morts pour la France.
A nouveau, M. le curé prend la parole. Il est heureux de
la circonstance qui lui donne l’occasion de célébrer une
fois de plus les 14 héros de sa paroisse, parmi lesquels figure
son prédécesseur.
« Appelé par le devoir, ils ont tout quitté,
ils sont tombés pour la noble cause du droit et de la liberté
pour la vie de la France chrétienne : car l’ennemi en voulait à
son territoire comme à sa foi. Nous leur avons juré un souvenir
éternel : y sommes-nous fidèles ? et suivons-nous la trace
de leurs vertus ? héros de charité, nos glorieux morts :
imitons-nous leur charité ? ».
La cette foule si compacte et si attentivement émue, M. l’abbé
Lefebvre adresse un dernier mot. Il lui dit son émotion et son
admiration pour la magnifique cérémonie qui touche à
sa fin. Il est heureux d’être venu ; il emportera le meilleur souvenir
de la journée. Enfin, et pour tout dire, il eut pour le curé
de la paroisse qui fut son vicaire, les mots du cœur les plus aimables et
les plus applaudis.
La chorale donna la cantate « aux soldats morts pour la
France ! » de Chérion ; le Réveil exécuta
un magnifique canon et on rentra à l’église pour le salut,
dont la chorale fournit encore les chants.
Avant de quitter le pays, les infatigables artistes ont voulu donner
un morceau d’adieu. la chorale exécuta « les martyrs aux
arènes » de Laurent de Rilli, et le Réveil de
Clichy un superbe ensemble de trompettes.
A M. et Mme Plaisant, nous adressons nos plus sincères félicitations
pour l’inoubliable fête dont leur glorieux fils fut l’objet et dont
ils furent les généreux inspirateurs.
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